Le travail de la Soie dans les Cévennes
Saviez-vous que les Cévennes étaient autrefois un centre de production de soie de renommée internationale ? Découvrez le travail de la soie dans les Cévennes . Des vers à soie aux textiles luxueux découvrez l’histoire fascinante de cette activité et son impact sur le territoire Cévenol pendant des siècles.
La soie, originaire de Chine, a été introduite en Occident au VIe siècle. La production de fil de soie est attestée dans les Cévennes, dans la région d’Anduze, dès le XIIIe siècle, mais la sériciculture ne s’est véritablement développée qu’à partir du XVIIIe siècle.
Au cœur des Cévennes, où la nature sauvage se mêle aux villages pittoresques, se cache un secret oublié : l’histoire fascinante de la soie. Autrefois surnommée “l’or des Cévennes“, cette industrie a façonné la région pendant des siècles, laissant derrière elle un héritage précieux et des paysages uniques.
Plongez dans son riche passé et son héritage encore présent aujourd’hui et découvrez en plus sur le travail de la soie dans les Cévennes !
Le travail de la Soie dans les Cévennes : un savoir-faire ancestral et précieux
La soie est un tissu qui se voit produit partout au fur et à mesure des siècles. L’arrivée de la sériciculture en France date du 13e siècle. La production commence dans le sud-est de la France, sous l’impulsion du pape Grégoire X, qui va importer des mûriers et des artisans italiens. Le roi Louis XI va ensuite le développer avec des manufactures à Tours.
Des actes notariés datant du 13e siècle nous indiquent que le travail de la soie existait déjà à ce moment-là dans le secteur. Si Lyon est considérée comme la capitale de la soie, ce sont les Cévennes qui vont être le centre historique principal de la sériciculture en France. C’est Henri IV qui va choisir les Cévennes comme lieu de production des vers à soie.
Les bas de soie produits dans les Cévennes se vendent alors autant sur le marché du Vigan, pour les locaux, qu’à l’étranger. Ces bas de qualité sont revêtus dans toutes les cours d’Europe et ce jusque dans les Indes Orientales.
L’élevage des vers à soie est alors domestique. Il n’est pas rare de trouver des magnaneries, soit des espaces réservés à l’élevage des vers à soie dans la maison. La production du fil à soie est alors quelque chose de familial, et ce jusqu’à la moitié du 19e siècle. Les petits ateliers sont alors ensuite remplacés par des unités de productions dans de grandes filatures industrielles. La sériciculture devient une véritable industrie.
L’industrialisation du travail de la soie en Cévennes
A partir du 17e siècle, les mûriers blancs, seule source de nourriture des vers à soie, viennent habiller de plus en plus les paysages cévenols. Ce sont les châtaigniers et les oliviers que l’on retrouve plus habituellement dans les Cévennes. Ils résistent cependant difficilement aux grandes gelées du 17e et 18e siècle. Cela va donc favoriser l’implantation des mûriers dans la région, pour compenser les pertes en arbres fruitiers.
Les grandes filatures industrielles, avec leur architecture typique, absorbent de plus en plus d’ouvriers et principalement des femmes. Il faut savoir que c’est les femmes qui mettaient le plus d’énergie dans l’éducation des vers à soie. Pour faciliter la transformation en cocon, les femmes plaçaient les graines sous leurs jupons pour apporter plus de chaleur.
En 1853, près de la moitié de la production française de cocon vient des Cévennes. La production de cocons est de 25 000 tonnes cette même année. C’est cependant à cette période que les vers à soie vont être touchés par une maladie. Elle va décimer plus de 80% de la population de vers. C’est une catastrophe pour l’industrie qui est alors rapidement concurrencée par la soie importées depuis l’étranger. Cette dernière est de moins bonne qualité mais coûte par conséquent bien moins chère. Les chiffres nous montrent qu’en 1865, la production de cocons ne dépasse pas les 300 tonnes.
Le déclin de l’industrie s’explique aussi au travers de la saturation des ouvriers et ouvrières qui dès 1895 entament des grèves. Si les fileuses rurales sont connues en premier lieu pour être dociles, les choses changent avec le temps qui passent. Les fileuses s’unissent pour un meilleur salaire et notamment et des conditions de travail moins extrêmes. En 1906, les ouvrières de Ganges arrivent à négocier une augmentation de 50 centimes par jour. Malgré les tentatives d’amélioration, la région va connaître une forte émigration, les habitants se reconvertissent par exemple dans la viticulture.
Face au déclin de l’industrie, les familles cévenoles sont donc contraintes de se tourner vers le travail de la mine ou de la viticulture. Les villes et villages des Cévennes sont peu à peu dépeuplés pour trouver de meilleures opportunités.
Les conditions de travail dans les filatures cévenoles
La soie, symbole de luxe et de raffinement, cache la réalité sombre des conditions de travail de ses travailleuses. Dans les Cévennes, il y a 600 usines qui fonctionnent nuits et jours durant l’âge d’or de la soie. Cela représente plus de 30.000 fileuses dans la région, nous apprend Luc Bazin, dans son article “Femmes cévenoles, filatures et soie“. Les femmes sont finalement les agents principaux du développement du travail de la soie dans les Cévennes.
Les filatures deviennent de véritables industries mécanisées, et les conditions de travail deviennent progressivement plus dures. Le temps de travail augmente avec l’arrivée de la machinerie, qui demandent plus de surveillance et d’entretien. Dans cette industrie, ce sont ls femmes que l’on observe le plus dans les filatures. Le travail des fileuses dans les filatures de soie est pénible et mal rémunéré. En effet, le salaire des fileuses n’est considéré que comme un revenu d’appoint pour les ménages de la région. Elles travaillaient de longues heures, souvent dans des conditions insalubres. Leur dos est courbé à longueur de journée, surveillant avec attention les bassines et les fils qui se dévident des cocons.
Il faut savoir aussi que le travail de la soie a une odeur. On l’on appelle “l’odeur de la fileuse” car elle suit les travailleuses. C’est l’odeur forte qui émane des cocons qui se décompose dans l’eau bouillante (80°). Les locaux nomment aussi cela l’odeur “de babòta” (du vers à soie en occitan). Outre cela, les fileuses sont soumises aux bruits assourdissants de la machinerie environnante et à l’air pollué par la poussière de soie.
L’encadrement des fileuses est principalement masculin. Toutes s’accordent à dire que les patrons et contre-maîtres sont en général assez autoritaires. Ils attendent en effet un certain rendement par jour. Si il n’est pas rempli, les fileuses font face à des sanctions.
Les conséquences évidentes de ces conditions de travail sont nombreuses. En effet, une étude du 19e a établi une liste des maladies et problèmes liés au travail de la soie. Les maladies et troubles respiratoires sont fréquents, que ce soit à cause des poussières, ou à cause des écarts de températures. Les affections cutanés sont récurrents, notamment à force d’avoir les mains dans les bassines.
Maison Rouge, Musée des Vallées cévenoles : les souvenirs liés au travail de la soie
Parmi les sites d’exception, Maison Rouge, musée des vallées cévenoles, constitue le dernier témoin d’une époque révolue où la France était un acteur majeur de l’industrie de la soie. Le musée est situé à Saint-Jean-du-Gard, dans les Cévennes méridionales, et l’une des villes incontournables à visiter dans le Gard. Maison Rouge n’est pas une simple bâtisse. Ce site tire son nom des briques rouges qui le composent, matériaux qu’il n’était pas habituel de trouver dans les Cévennes lorsque le bâtiment est construit alors.
Il faut dire que Maison Rouge n’est pas une filature comme les autres. En 1809, elle est la première au monde à être équipée du système Gensoul. Ce système ingénieux permettait de chauffer les bassines qui servaient aux fileuses à la vapeur.
Le bâtiment typique de filature, qui accueille le musée aujourd’hui, a été construit entre 1836 et 1838. Il est équipé de 106 bassines et représente parfaitement les filatures typiques du 19e siècle en Cévenne. La filature a connu son apogée au XIXe siècle, employant jusqu’à 150 femmes et produisant des soies de haute qualité renommées dans le monde entier.
Maison Rouge constitue la dernière filature de soie française, et ferme ses portes en 1965. Cela marque la fin d’une ère. La concurrence internationale, l’avènement des fibres synthétiques et l’évolution des goûts ont eu raison de cette industrie autrefois florissante. La France, qui comptait plus de 20 000 métiers à tisser la soie au début du XXe siècle, n’en compte plus que quelques centaines aujourd’hui.
L’ancienne filature abrite aujourd’hui un musée qui retrace l’histoire de la sériciculture en France. On y découvre les différentes étapes de la production de la soie, des cocons aux étoffes raffinées, ainsi que les outils et les machines utilisés par les travailleurs. Ce musée est une véritable mine d’informations pour comprendre l’importance de la soie dans l’économie et la société française d’autrefois.
En résumé…
La soie est depuis toujours associée au luxe et à l’élégance. Sa rareté et ses qualités exceptionnelles en font un matériau convoité par les créateurs et les amateurs de haute couture. De nos jours, la soie continue d’être un symbole de raffinement et de sophistication.
Le travail de la soie est un héritage précieux qui mérite d’être protégé et valorisé. La mondialisation et l’industrialisation textile menacent la pérennité de ce savoir-faire ancestral. Des initiatives locales et internationales visent à préserver et transmettre ce patrimoine unique aux générations futures.
De plus, malgré son déclin, Maison Rouge continue de symboliser l’espoir d’un renouveau de la sériciculture française. Des initiatives locales visent à redynamiser cette filière en misant sur la qualité et le savoir-faire français. Maison Rouge est un lieu de mémoire et d’inspiration pour les nouvelles générations qui souhaitent perpétuer cet héritage précieux.